
Cher TOI Madame, Monsieur,
Vous me disiez avoir besoin d'un texte pour votre catalogue.Que fait un peintre?
Il peint. Sait-il écrire? Assurément, s'il a bien suivi les cours élémentaires puis petite et grande section, s'il a bien appris à faire une rédaction et ensuite une dissertation, s'il a bien réfléchi aux questions qu'on lui pose, il saura écrire. D'ailleurs, il lui faudra bien,ne serait-ce que pour s'inscrire aux honorables institutions auxquelles il lui faudra à plusieurs reprises écrire pour obtenir des réponses qui exigeront peut-être un vrai talent de lecteur entre les lignes.
Saura-t-il écrire aux galeristes pour leur proposer ses travaux?
Leur vendra-t-il ses oeuvres comme dans une vraie lettre de motivation,vantant ses compétences et ses qualités,essayant d'aiguiser leur curiosité;les intéresser à son travail?Il ne sera pas toujours digne du Prix Goncourt.Que faire? Galérer?
Saura-t-il écrire aux journalistes pour les informer, les inviter à venir voir son boulot et à en parler par la suite,quitte à leur proposer le contenu du dossier de presse qu'il aura lui-même écrit?
Saura-t-il écrire aux éminents critiques d'art pour qui l'art est aisé et la critique difficile?Saura-t-il leur dire,notre cher peintre,que ses blancs sont gris,qu'il a la tête à l'envers mais les pieds sur terre?Quelle position difficile pour faire de la littérature! Encore heureux que lui, barbouilleur de son état, n'ait pas à se promouvoir poète quand il trouve des titres ni à briguer les palmes quand il explique ses techniques et ses recherches.
Au fil de ma réponse, je m'aperçois, Monsieur le catalogueur (êtes-vous l'un des trois Helvètes?Je le redoute!)je réalise donc que je les manie, les mots, parce que j'en ai besoin mais que si je peins c'est justement pour ne pas les employer! Si les images existent c'est bien que les mots ne suffisent pas. La peinture, l'image, se passe des mots un point c'est tout. Vous avez compris ou je vous fais un dessin?
Vôtre.
Claude Francheteau.Nantes, printemps 2005.
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